Quand j’étais petit, généralement, personne ne faisait rien le dimanche soir. Ma mère nous préparait un repas frugal à base de soupe et biscottes beurrées, ou au mieux de la charcuterie, et on regardait la télévision, comme Kad et Olivier dans “Déjà dimanche”, l’émission de Delarue puis “Ça cartoon” présentée par Philippe Dana et/ou E=M6. A la fin des programmes, il fallait préparer son cartable pour aller à l’école le lundi. Le dimanche soir a toujours été un moment calme, entre tristesse de la fin de week-end et manque d’engouement pour retourner à l’école. Pourtant, j’ai toujours apprécié l’école.
J’ai gardé ce rythme dominical pendant longtemps, toutes mes études en fait. Le dimanche, c’était sacré, avant le démarrage de la semaine, le repos était de rigueur. Quand j’étais étudiant, j’avais rarement envie de sortir ce soir-là. Et même pendant les vacances, c’était un moment privilégié que je pouvais passer avec mes parents. Parfois, en fin de vacances, je me contentais d’un McDo avec des potes de fac et je rentrais en déprimant. Il faut dire, on s’était répété “Demain, retour en cours” pendant tout le BigMac et c’était pas très réconfortant, ni motivant.
Quand j’étais au chômage, j’ai aussi gardé ce rituel et pourtant, une chose avait changé : c’était tous les jours dimanche… Paradoxalement, j’étais capable de sortir 6 dimanches sur 7. Je restais chez moi le dernier dimanche de la semaine. Je crois que la sensation de se dire “Oh, demain, ça sera la même chose, je n’irais ni bosser, ni étudier” est louche. On s’en fout très vite de tout. Ce moment de calme et de nostalgie du week-end tout récemment terminé m’a manqué. Pendant 9 mois, c’était étrange de se dire que le dimanche soir n’était qu’un soir comme les autres.
Mon début de vie professionnelle n’a pas vraiment changé mon point de vue. Quand j’ai commencé ma vie sur Lille, je sortais de temps en temps, puis de plus en plus souvent. Le jour de sortie importait peu, j’aimais aussi beaucoup sortir le week-end. Au fil du temps, j’avais des vraies soirées de dimanche off. Si je sortais jusque 12h le dimanche matin (oui, j’avais le sens de la fête très prononcé), je me levais à 18h pour terminer mon week-end avec un état de “putain mais c’est passé trop vite” extrêmement latent, omniprésent et assez destructeur. Ce n’était pas tous les week-ends, fort heureusement. Là, c’était du dimanche soir court, j’y vivais seulement 3h, avec un bol de Ramen et un film débile à la TV.
Il y avait des jours dominicaux que je passais à Wazemmes. Je “faisais” le marché (comprendre “boire des bières en mangeant des nems ou du poulet”), zonais avec mes potes et rentrais à 19h. Hors de question d’aller plus loin : c’était dimanche, il fallait bosser le lendemain. Terminer la soirée après 19h était inconcevable dans mon esprit.
Au total, j’ai probablement dû passer quelques dimanches soir à sortir avec des potes, dans ma période de sortie extrême. Je l’ai souvent regretté le lundi matin, en me détestant d’amorcer ma semaine comme cela. Évidemment, tout cela se passait en période de travail. Je ne compte pas les vacances, c’est sacré et chaque soirée reste une soirée de vacances. On a 5 semaines dans l’année, il ne faut pas abuser, il faut en profiter.
En réalité, pendant ces soirées, les gens que l’on rencontre ne sont pas les mêmes qu’à l’habituel : ce sont des cafetiers, des serveurs de boîte de nuit, des commerçants, des banquiers. En réalité, ce sont ceux qui bossent le samedi et ont une semaine décalée. Un univers où le dimanche est le samedi, et le lendemain de dimanche, c’est leur dimanche. Fort peu compatible avec des horaires de bureau.
Il est totalement inconcevable pour moi de sortir un dimanche soir maintenant. Cet esprit de tranquillité de fin de week-end est primordial, je le respecte. Je fais comme avant : je regarde toujours E=M6 en mangeant. C’est cool, cela me permet de me recentrer, de profiter d’être avec ma compagne, de finir la semaine normalement pour bien démarrer celle qui arrive. Je refuse systématique les invitations à aller boire un verre. Et cela même après un dimanche d’été avec barbecue avec mes potes. Je pense que si je me mettais à sortir un dimanche soir, ça serait un signe de déséquilibre dans ma vie. Et en toute honnêteté : j’aurais trop de culpabilité. Pas spécialement par rapport au travail, parce que j’assumerais. J’aurais des regrets, je me dirais que c’était pas le soir le plus propice pour bouger. Commencer sa semaine par une fatigue évitable, c’est vraiment une sensation dégueulasse et qui est lourde à porter : il reste toute la semaine à se coltiner ! Je préfère m’en dispenser et ça, jusque toujours.